Nous reproduisons ici l’éditorial de Démocratie&Socialisme de mars (n°323), la revue de L’APRÈS
La nouvelle administration étasunienne introduit des ruptures majeures dans les relations internationales, avec notamment l’alignement de Trump sur Poutine contre l’Ukraine et la préparation d’une possible confrontation militaire entre les États-Unis et la Chine. La mainmise impérialiste sur les ressources naturelles est une constante du capitalisme. Mais elle s’intensifie aujourd’hui avec la raréfaction de ces dernières.
Ni Trump, ni Poutine
Dans ce contexte, nous devons partir des intérêts de notre camp : le salariat (celles et ceux qui n’ont que leur force de travail à vendre), en toute indépendance vis-à-vis de la classe dominante. À ce titre, les travailleurs russes, chinois ou américains ne sont pas nos ennemis.
En revanche, notre internationalisme n’est pas abstrait. Il défend l’autodétermination des peuples. Les Palestinien.nes et les Ukrainien.nes ont le droit à un État souverain. D’où la bataille pour que la France reconnaisse l’État de Palestine et pour adopte des sanctions contre Israël – le 7 octobre ne justifiant en rien les crimes de guerre commis à Gaza et en Cisjordanie. Notre internationalisme implique aussi l’aide militaire et humanitaire à l’Ukraine résistante.
Non aux surenchères guerrières, oui à l’aide à l’Ukraine
Nous sommes lucides : tous les discours guerriers et bellicistes de nombre de dirigeants européens – dont Macron – ne doivent pas cacher la réalité de l’aide insuffisante de l’Union européenne et de ses membres à l’Ukraine. Ce devrait pourtant être une priorité.
Rappelons que les budgets militaires cumulés des États européens dépassent largement celui de la Russie. En 2023, les dépenses militaires de cette dernière s’élevaient à 109 milliards de dollars, tandis que les 27 pays de l’UE consacraient à la défense 312 milliards.
Pour aider concrètement l’Ukraine, il conviendrait tout d’abord de réorienter à son profit les livraisons d’armes prévues à des États autoritaires. Il faudrait ensuite réquisitionner les avoirs des soutiens du régime de Poutine, mais aussi taxer les hypers-riches et grandes sociétés transnationales. Plus structurellement, une aide efficace impose de créer une ligne budgétaire garantie par la BCE et indépendante de la dette des États, et de nationaliser les industries de la défense afin d’éviter tout effet d’aubaine pour les marchands d’armes.
Refuser l’austérité encore et toujours
Macron en appelle au patriotisme et à une forme d’union nationale. Pendant ce temps, le patron français de CMA-CGM, le milliardaire Rodolphe Saadé*, proche de Macron, accourt faire allégeance à Trump… N’oublions jamais que la classe dominante est d’abord mue par ses propres intérêts : ses profits.
La riposte de la France comme de l’UE ne doit pas prendre aux services publics sociaux, éducatifs, sanitaires, environnementaux, d’une main, pour donner à l’armement. À chaque euro pour l’armement doivent correspondre plusieurs euros pour les besoins sociaux. Et c’est parfaitement possible. Il faut augmenter les impôts sur la richesse, le patrimoine et le capital.
Plus que jamais unité à gauche
En France, la gauche et les écologistes doivent travailler à des réponses communes sur toutes ces questions. C’est possible par exemple sur la solidarité avec l’Ukraine : un socle commun se trouve dans le programme du NFP. L’action unitaire de la gauche politique avec les syndicats et les associations est tout aussi déterminante aujourd’hui. Pour les libertés démocratiques, pour la bifurcation écologique qui tend à être sacrifiée, en France comme au plan européen.
C’est aussi le besoin d’une campagne commune sur les retraites, pour l’abrogation de la retraite à 64 ans, pour obtenir une loi alternative. Mener des campagnes en commun sera le meilleur moyen pour empêcher le RN de poursuivre sa progression. Quand la gauche s’unit et agit, l’extrême droite recule.
* Mathias Thépot, « Rodolphe Saadé, le milliardaire chouchou de Macron », Mediapart 17 juin 2024.